Règlement modifiant certains règlements visant les drogues d’usage restreint (Programme d’accès spécial) : DORS/2021-271

La Gazette du Canada, Partie II, volume 156, numéro 1

Enregistrement
DORS/2021-271 Le 21 décembre 2021

LOI RÉGLEMENTANT CERTAINES DROGUES ET AUTRES SUBSTANCES

LOI SUR LES ALIMENTS ET DROGUES

C.P. 2021-1029 Le 17 décembre 2021

Sur recommandation du ministre de la Santé, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Règlement modifiant certains règlements visant les drogues d’usage restreint (Programme d’accès spécial), ci-après, en vertu :

Règlement modifiant certains règlements visant les drogues d’usage restreint (Programme d’accès spécial)

Loi réglementant certaines drogues et autres substances

Règlement sur les aliments et drogues

1 (1) Les définitions de ordonnance et de pharmacien, à l’article J.01.001 du Règlement sur les aliments et drogues référence 1, sont abrogées.

(2) La définition de drogue d’usage restreint, à l’article J.01.001 du même règlement, est remplacée par ce qui suit :

drogue d’usage restreint
S’entend des substances désignées qui sont visées à l’annexe de la présente partie. (restricted drug)

2 (1) Le passage du paragraphe J.01.004(1) du même règlement précédant l’alinéa a) est remplacé par ce qui suit :

Personnes autorisées

J.01.004 (1) Les personnes ci-après sont autorisées à avoir en leur possession une drogue d’usage restreint mentionnée à la partie I de l’annexe de la présente partie :

(2) Le paragraphe J.01.004(2) du même règlement est remplacé par ce qui suit :

Mandataires

(2) Toute personne est autorisée à avoir en sa possession une drogue d’usage restreint mentionnée à la partie I de l’annexe de la présente partie si elle agit comme mandataire d’une personne visée aux alinéas (1)a), b), d) ou e).

(3) Le passage du paragraphe J.01.004(3) du même règlement précédant l’alinéa a) est remplacé par ce qui suit :

Mandataires — personne visée à l’alinéa (1)c)

(3) Toute personne est autorisée à avoir en sa possession une drogue d’usage restreint mentionnée à la partie I de l’annexe de la présente partie si les conditions ci-après sont réunies :

Règlement sur les stupéfiants

3 (1) Le passage de la définition de stupéfiant précédant l’alinéa a), au paragraphe 2(1) du Règlement sur les stupéfiants référence 2, est remplacé par ce qui suit :

stupéfiant S’entend de l’une des substances suivantes :

(2) Le paragraphe 2(2) du même règlement est abrogé.

Loi sur les aliments et drogues

Règlement sur les aliments et drogues

4 Le paragraphe C.08.010(3) du Règlement sur les aliments et drogues référence 1 est abrogé.

5 Le paragraphe C.08.011.1(2) du même règlement est abrogé.

Entrée en vigueur

6 Le présent règlement entre en vigueur à la date de sa publication dans la Partie II de la Gazette du Canada.

RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Le présent résumé ne fait pas partie du Règlement.)

Enjeux

Les médicaments qui n’ont pas encore été approuvés pour la vente au Canada peuvent généralement être demandés en passant par le Programme d’accès spécial de Santé Canada lorsque les traitements conventionnels ont échoué, ne conviennent pas ou ne sont pas disponibles. En raison des modifications apportées à la partie C du Règlement sur les aliments et drogues en 2013, les drogues d’usage restreint sont devenues la seule catégorie de substances désignées ne pouvant pas faire l’objet d’une demande dans le cadre du Programme d’accès spécial.

Les drogues d’usage restreint sont des substances désignées inscrites à l’annexe de la partie J du Règlement sur les aliments et drogues référence 3. Les drogues d’usage restreint n’ont pas d’usage médical approuvé. Depuis les modifications réglementaires apportées en 2013, la science concernant l’efficacité et l’innocuité de certaines drogues d’usage restreint a continué de progresser, démontrant actuellement que certaines d’entre elles ont des usages thérapeutiques possibles, y compris dans des essais cliniques de phase II et de phase III référence 4.

En raison des modifications réglementaires de 2013, en application de la Loi sur les aliments et drogues, les essais cliniques sont devenus le seul moyen d’autoriser la vente d’une drogue d’usage restreint pour le traitement de patients. Les essais cliniques demeurent le meilleur moyen d’autoriser la vente de drogues d’usage restreint (ou de toute autre drogue non approuvée) pour le traitement de patients, mais il n’est pas toujours possible pour un patient d’y prendre part. Par exemple, il se peut qu’il n’y ait pas d’essai clinique qui recrute actuellement des candidats pour une drogue précise, ou dans une région précise du pays. Compte tenu de l’intérêt scientifique croissant envers certaines drogues d’usage restreint, on s’attend à ce que Santé Canada se trouve dans une situation où les preuves scientifiques appuient l’usage thérapeutique d’une drogue d’usage restreint dans le contexte du Programme d’accès spécial.

Les modifications apportées en 2013 concernaient également la définition de drogue d’usage restreint dans la partie J du Règlement sur les aliments et drogues, afin d’inclure tout produit non autorisé contenant de la cocaïne (c’est-à-dire les produits contenant de la cocaïne qui n’ont pas fait l’objet du processus d’examen et d’approbation de Santé Canada et auxquels une identification numérique de drogue n’a pas été attribuée référence 5, ainsi que les produits contenant de la cocaïne qui n’ont pas été autorisés dans le cadre d’un essai clinique approuvé ou qui n’ont pas été composés par un pharmacien conformément à une ordonnance). Au même moment, des modifications ont été apportées au Règlement sur les stupéfiants afin que seuls les médicaments d’ordonnance approuvés contenant de la cocaïne restent assujettis aux exigences de ce règlement. À la suite de ces modifications, la cocaïne est devenue la seule substance désignée visée par deux règlements différents. La double réglementation de la cocaïne complique la tâche de ceux qui mènent ou qui demandent à mener des activités avec de la cocaïne, comme les chercheurs et les distributeurs autorisés, puisqu’ils doivent déterminer lequel des deux règlements s’applique aux divers produits contenant de la cocaïne.

Contexte

Cadre réglementaire pour les substances désignées et les drogues d’usage restreint au Canada

La Loi réglementant certaines drogues et autres substances est la loi fédérale qui fournit un cadre pour le contrôle des substances susceptibles d’altérer les processus mentaux, de nuire à la santé et d’être néfastes pour la société lorsqu’elles sont détournées vers un marché illicite ou mal utilisées. Ces substances sont définies comme état des substances désignées et sont énumérées dans les annexes I à V de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Diverses infractions et peines sont également énoncées dans cette loi relativement aux opérations interdites menées avec des substances.

Les règlements pris en application de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances fournissent un cadre dans lequel sont permises les activités légitimes telles que la possession, la production, la vente, l’importation et l’exportation de substances désignées. Aux termes de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, il existe quatre catégories de substances désignées : les stupéfiants, les substances ciblées, les drogues contrôlées et les drogues d’usage restreint. Chacune de ces catégories est assujettie à un règlement différent pris en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances.

Les drogues d’usage restreint sont des substances désignées en vertu de la partie J du Règlement sur les aliments et drogues. Elles n’ont généralement aucun usage médical approuvé, et ne peuvent être utilisées qu’à des fins scientifiques ou de recherche, par exemple lors d’essais cliniques. Le règlement ne permet pas aux praticiens, aux pharmaciens ou aux patients d’exercer des activités avec des drogues d’usage restreint étant donné qu’elles n’ont pas d’usage médical approuvé. Le règlement ne permet pas non plus à un distributeur autorisé de vendre une drogue d’usage restreint à un praticien. Pour mener en toute légalité des activités avec des drogues d’usage restreint qui ne sont pas autorisées en application de la partie J du Règlement sur les aliments et drogues, il faut obtenir une exemption aux termes du paragraphe 56(1) de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances.

En raison de leurs effets pharmacologiques, les substances désignées répondent également à la définition de « drogue » selon la Loi sur les aliments et drogues, et sont donc aussi assujetties à cette loi et à ses règlements. En vertu du Règlement sur les aliments et drogues, l’importation et la vente de toute drogue sont interdites sauf si un avis de conformité a été délivré ou une identification numérique de drogue a été attribuée à la suite du processus établi d’examen et d’approbation d’un médicament de Santé Canada. L’accès aux médicaments qui n’ont pas été approuvés pour la vente au Canada peut être obtenu par un essai clinique autorisé ou par le Programme d’accès spécial de Santé Canada.

Programme d’accès spécial

Le ministre de la Santé peut, en application de la partie C du Règlement sur les aliments et drogues, délivrer une lettre d’autorisation permettant à un fabricant de vendre un médicament non homologué à un praticien pour le traitement d’urgence d’un patient dans certaines circonstances. Le Programme d’accès spécial permet aux praticiens de demander l’accès à des médicaments qui ne sont pas disponibles au Canada afin de traiter leurs patients atteints de maladies graves ou mortelles lorsque les traitements conventionnels ont échoué, ne conviennent pas ou ne sont pas disponibles.

Les demandes soumises au Programme d’accès spécial sont évaluées au cas par cas, en tenant compte du niveau de preuves scientifiques (y compris les preuves relatives à l’innocuité et à l’efficacité) pour appuyer l’utilisation du médicament en vue de traiter le problème de santé précis du patient. Habituellement, les demandes soumises au Programme d’accès spécial ne sont prises en compte que lorsque l’on dispose déjà de résultats positifs à des essais cliniques de phase II ou phase III.

Lorsque le Programme d’accès spécial autorise la vente d’une quantité précise d’un médicament non homologué, le praticien demandeur doit fournir le nom et l’adresse municipale de l’établissement où le médicament sera expédié. La personne qui reçoit l’envoi du médicament doit être un praticien ou un pharmacien.

Il incombe aux praticiens qui présentent des demandes au nom de leurs patients de s’assurer que ces derniers sont au courant des risques et des avantages potentiels du médicament demandé ainsi que de son stade de développement.

Drogues d’usage restreint

En 2013, des modifications ont été apportées au Règlement sur les stupéfiants ainsi qu’aux parties C et J du Règlement sur les aliments et drogues afin d’empêcher l’autorisation, par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial, de drogues d’usage restreint, de la diacétylmorphine (c’est-à-dire l’héroïne) et de produits non autorisés contenant de la cocaïne. Lorsque les modifications réglementaires ont été apportées en 2013, Santé Canada n’avait encore reçu aucune demande d’un praticien en vue d’accéder à des drogues d’usage restreint par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial, même si cela avait été théoriquement possible avant les modifications de 2013.

En septembre 2016, la diacétylmorphine a été retirée de l’annexe de la partie J du Règlement sur les aliments et drogues et ajoutée à l’annexe au Règlement sur les stupéfiants, ce qui a redonné aux praticiens la possibilité de demander l’accès à cette drogue au moyen du Programme d’accès spécial. Toutefois, les autres modifications de 2013 ont été maintenues.

Réglementation de la cocaïne

Avant les modifications réglementaires de 2013, la cocaïne sous toutes ses formes était réglementée aux termes du Règlement sur les stupéfiants. À la suite des modifications de 2013, les produits contenant de la cocaïne qui avaient une identification numérique de drogue, dont la vente était autorisée dans le cadre d’un essai clinique ou qui étaient composés par un pharmacien conformément à une ordonnance étaient réglementés en tant que stupéfiants en application du Règlement sur les stupéfiants, tandis que tous les autres produits contenant de la cocaïne étaient réglementés en tant que drogues d’usage restreint en application de la partie J du Règlement sur les aliments et drogues. Dans les faits, la cocaïne est devenue assujettie à deux règlements différents aux termes de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances : le Règlement sur les stupéfiants et la partie J du Règlement sur les aliments et drogues. La cocaïne est la seule substance désignée visée par deux règlements différents en application de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances.

Objectif

L’objectif des modifications réglementaires est de donner de nouveau la possibilité aux praticiens de demander l’accès à des drogues d’usage restreint par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial. Dans la pratique, cela signifie que les praticiens pourront, au nom de patients atteints de maladies graves ou mortelles, demander l’accès à des drogues d’usage restreint par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial lorsque les traitements conventionnels ont échoué, ne conviennent pas, ou ne sont pas disponibles au Canada.

Avec ces modifications, la cocaïne serait également supprimée de la définition de « drogue d’usage restreint » et tous les produits contenant de la cocaïne seraient alors réglementés en tant que stupéfiants en application du Règlement sur les stupéfiants. La réglementation de tous les produits contenant de la cocaïne en application du Règlement sur les stupéfiants simplifiera le processus pour les intervenants qui mènent ou qui demandent à mener des activités avec de la cocaïne.

Description

Rétablissement d’un accès potentiel aux drogues d’usage restreint par le biais du Programme d’accès spécial

Les modifications abrogent les dispositions de la partie C du Règlement sur les aliments et drogues qui interdisent d’autoriser la vente ou l’importation d’une drogue d’usage restreint aux fins du Programme d’accès spécial. Ces modifications donnent à Santé Canada le pouvoir discrétionnaire d’autoriser la vente de drogues d’usage restreint aux fins de traitement d’urgence par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial, à condition que la demande présentée par le praticien respecte toutes les exigences applicables référence 6.

Assujettissement de toutes les formes de cocaïne au Règlement sur les stupéfiants

La définition de « drogue d’usage restreint », dans la partie J du Règlement sur les aliments et drogues, est modifiée en supprimant toute mention de la cocaïne. Pour tenir compte de cette modification de la définition, certaines dispositions supplémentaires figurant dans la partie J du Règlement sur les aliments et drogues sont également modifiées afin d’éliminer les références à la cocaïne. Le Règlement sur les stupéfiants est également modifié en abrogeant la disposition qui exclut les formes non approuvées de cocaïne de l’annexe du Règlement sur les stupéfiants. Ces modifications ont pour conséquence de soustraire la cocaïne de la définition de « drogue d’usage restreint » et font donc en sorte que toutes les formes de cocaïne sont assujetties exclusivement aux exigences du Règlement sur les stupéfiants.

De plus, les définitions des termes « pharmacien » et « ordonnance » sont abrogées de la partie J du Règlement sur les aliments et drogues puisqu’elles n’avaient été incluses que pour appuyer l’ajout de la cocaïne à la définition de « drogue d’usage restreint » en 2013.

Élaboration de la réglementation

Consultation

Le 12 décembre 2020, Santé Canada a publié un Avis d’intention dans la Partie I de la Gazette du Canada afin d’annoncer son intention de modifier le Règlement sur les aliments et drogues et le Règlement sur les stupéfiants pour rétablir l’accès potentiel à des drogues d’usage restreint par le biais du Programme d’accès spécial. La publication de cet avis a déclenché une période de commentaires de 60 jours pendant laquelle le ministère a reçu des commentaires écrits de la part de 392 répondants uniques. La consultation ciblait les professionnels et les organisations de la santé, les chercheurs et les universitaires, les distributeurs autorisés ainsi que le grand public.

Les réponses obtenues provenaient majoritairement de membres du public; 25 réponses ont été soumises au nom d’organisations. La soumission d’une organisation a notamment reçu l’appui de 922 personnes qui ont apposé leur signature ou appuyé la soumission par écrit. Les réponses données par des organisations ont été réparties dans les catégories suivantes :

Lors de la période de consultation publique, Santé Canada a reçu des soumissions de quatre campagnes épistolaires. Au total, les soumissions provenant de campagnes épistolaires représentaient environ 14 % des réponses obtenues. Dans certains cas, les répondants ont accompagné les lettres types de témoignages uniques.

De nombreuses soumissions dépassant le cadre de ce projet de réglementation ont été reçues en réponse à l’Avis d’intention, notamment des commentaires généraux au sujet du Programme d’accès spécial et de l’administration de ce programme en ce qui concerne précisément les drogues d’usage restreint psychédéliques. Bien que le ministère ait pris en compte ces soumissions, les commentaires de cette nature n’ont pas été inclus dans le résumé de la consultation puisqu’elles ne s’appliquent pas expressément à ce projet de réglementation.

Dans l’ensemble, la quasi-totalité des commentaires était favorable aux modifications réglementaires proposées ou à l’élargissement de l’accès aux substances psychédéliques. Les commentaires de personnes opposées à la proposition étaient très peu nombreux et représentaient moins de 2 % de l’ensemble des réponses.

Plus de 80 % des répondants associaient la proposition de Santé Canada à un élargissement de l’accès aux drogues d’usage restreint psychédéliques (par exemple MDMA, psilocybine, LSD, DMT), souvent pour le traitement de diverses maladies, plus particulièrement les troubles de santé mentale. Certains répondants individuels se sont identifiés comme professionnels de la santé (par exemple médecins, conseillers cliniciens, infirmières et infirmiers autorisés), travailleurs de première ligne (p. ex. travailleurs sociaux), chercheurs ou scientifiques. Les médecins et les thérapeutes ont souvent déclaré qu’ils souhaitaient élargir les options thérapeutiques dont ils disposent afin d’inclure les drogues d’usage restreint psychédéliques. D’autres personnes (22 % environ) ont indiqué souffrir ou avoir souffert de problèmes de santé mentale ou d’autres maladies, et bon nombre d’entre elles ont déclaré s’intéresser personnellement à l’obtention d’un traitement au moyen d’une drogue d’usage restreint psychédélique. Plusieurs personnes ont également parlé, dans leur soumission écrite, de membres de leur famille ou d’amis qui ont éprouvé des problèmes de santé mentale ou une détresse psychologique en lien avec un diagnostic médical et pour qui, selon eux, l’utilisation thérapeutique d’une drogue d’usage restreint psychédélique serait bénéfique. Les auteurs de nombreuses soumissions ont affirmé que la santé mentale des Canadiens n’est pas bonne et que les options thérapeutiques actuelles pour les troubles de santé mentale sont limitées, relativement peu efficaces et accompagnées d’effets secondaires négatifs. Dans ces cas, les répondants estimaient que les drogues d’usage restreint psychédéliques offriraient une option thérapeutique prometteuse qui devrait être offerte aux patients. Les résultats de cette consultation ont montré le fort intérêt du public à l’égard de l’utilisation des drogues d’usage restreint psychédéliques à des fins thérapeutiques. Le projet réglementaire a été fréquemment mal interprété comme signifiant qu’il y aurait un accès aux drogues d’usage restreint psychédéliques par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial et que cet accès serait accordé à un grand nombre de personnes. De nombreux répondants, qu’il s’agisse de particuliers ou d’organisations, ont appuyé ou préconisé l’accès à certaines drogues d’usage restreint qui dépassaient la portée du Programme d’accès spécial. Quelques organisations ont par exemple appuyé la proposition réglementaire en affirmant qu’elle va « dans le bon sens », en regrettant toutefois qu’elle n’aille pas plus loin encore. En général, ces réponses avaient davantage rapport avec la légalisation des psychédéliques à des fins médicales.

Il faut noter, en particulier, que les modifications réglementaires ne donneront pas accès à grande échelle aux drogues d’usage restreint et n’indiquent pas une intention de décriminaliser ou de légaliser les drogues d’usage restreint. Le Programme d’accès spécial concerne uniquement les traitements d’urgence. En outre, l’annulation de l’interdiction d’accès aux drogues d’usage restreint ne garantit pas que les demandes concernant des drogues d’usage restreint psychédéliques ou toute autre drogue d’usage restreint donneront lieu à une autorisation dans le cadre du Programme d’accès spécial. Toutes les demandes continueront à être évaluées au cas par cas en tenant compte du niveau de preuve concernant l’innocuité et l’efficacité de l’utilisation proposée, ainsi que de la maladie du patient et de son état clinique.

Deux organisations s’opposaient aux modifications réglementaires proposées en raison des changements concernant la cocaïne. Plus précisément, une organisation s’inquiétait du fait que les modifications réglementaires puissent inciter les médecins à prescrire de la cocaïne en tant que traitement de première intention pour les troubles liés à la consommation de stimulants, remplaçant ainsi le traitement complet des dépendances et accroissant la disponibilité d’une cocaïne à faible coût. Selon l’autre organisation, les modifications proposées accroîtraient l’accès à un approvisionnement sécuritaire en cocaïne et feraient augmenter les taux de toxicomanie. Cette organisation préconisait plutôt une amélioration de l’accès à la désintoxication, au traitement et aux programmes de rétablissement. Il est important de noter que le Programme d’accès spécial évalue les demandes de traitement d’urgence au cas par cas. Il ne permettra donc pas d’obtenir facilement à la cocaïne à l’aide d’une ordonnance médicale. Ces inquiétudes n’ont débouché sur aucune modification de la proposition.

Enfin, certains intervenants ont indiqué qu’ils souhaitaient que ces modifications réglementaires soient apportées dès que possible. Étant donné que les modifications réglementaires annulent les modifications de 2013 et compte tenu de l’appui massif à l’égard de la proposition, d’autres consultations avec les intervenants ne permettraient vraisemblablement pas d’obtenir d’autres points de vue. De plus, la modification rapide des règlements pourrait profiter à certains patients. C’est pourquoi il n’y a pas eu de publication préalable du projet de réglementation.

Il est important de noter que les modifications réglementaires n’entraîneront pas l’accès à grande échelle aux drogues d’usage restreint; chaque demande au Programme d’accès spécial sera évaluée au cas par cas.

Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones

Conformément à la Directive du cabinet sur l’approche fédérale pour la mise en œuvre des traités modernes, une analyse a été menée pour déterminer si ces modifications sont susceptibles d’être associées à des obligations imposées par les traités modernes. L’évaluation a permis de conclure que les modifications ne devraient pas avoir de répercussions liées aux traités modernes.

Choix de l’instrument

Statu quo

Si aucune modification n’est apportée (« scénario de base »), l’accès potentiel à des drogues d’usage restreint par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial resterait interdit. En application de la Loi sur les aliments et drogues, les essais cliniques resteraient le seul moyen d’autoriser la vente d’une drogue d’usage restreint pour le traitement de patients.

Les essais cliniques demeurent le meilleur moyen d’autoriser la vente de drogues non approuvées pour le traitement de patients, mais il n’est pas toujours possible pour un patient d’y prendre part. Par exemple, il se peut qu’il n’y ait pas d’essai clinique qui recrute actuellement des candidats pour une drogue précise, ou dans une région précise du pays. Dans ce genre de situations et lorsque les traitements conventionnels ont échoué, ne conviennent pas, ou ne sont pas disponibles, les praticiens peuvent habituellement demander l’accès à ces drogues en passant par le Programme d’accès spécial. Toutefois, les drogues d’usage restreint demeureraient la seule catégorie de substances désignées qui ne peuvent pas être autorisées dans le cadre du Programme d’accès spécial. Le maintien du statu quo n’a donc pas été considéré comme une option viable pour atteindre l’objectif déclaré.

Mesure réglementaire

À la suite des modifications réglementaires apportées en 2013, les intervenants ont lancé des appels de plus en plus insistants à Santé Canada afin qu’une annulation de ces modifications soit envisagée, ce qui rétablirait l’accès potentiel aux drogues d’usage restreint par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial. Il existe de nouvelles données scientifiques à l’appui d’usages thérapeutiques possibles de certaines drogues d’usage restreint, plus particulièrement de drogues d’usage restreint psychédéliques telles que la MDMA et la psilocybine, auxquelles la Food and Drug Administration des États-Unis a accordé la désignation de « thérapie innovante » référence 7 pour le traitement du trouble de stress post-traumatique et de la dépression résistante au traitement, respectivement.

Le maintien des modifications réglementaires de 2013 (c’est-à-dire le statu quo) limiterait les options thérapeutiques potentielles disponibles pour le traitement d’urgence de certains patients. Étant donné que l’interdiction d’accès à des drogues d’usage restreint par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial a été mise en place par le truchement d’un règlement, la modification réglementaire est la seule option viable pour rétablir cette voie d’accès et régler la question de la double réglementation de la cocaïne. Le meilleur moyen d’atteindre l’objectif énoncé était l’abrogation des autres modifications réglementaires apportées en 2013.

Analyse de la réglementation

Avantages et coûts

Avantages

Compte tenu de l’intérêt scientifique croissant envers certaines drogues d’usage restreint, on s’attend à ce que Santé Canada se trouve en fin de compte dans une situation où les preuves scientifiques appuient l’usage thérapeutique d’une drogue d’usage restreint dans le contexte du Programme d’accès spécial. On s’attend donc à ce que les modifications réglementaires profitent aux patients atteints d’une maladie grave ou potentiellement mortelle qui pourraient obtenir l’accès à des drogues d’usage restreint dans le cadre du Programme d’accès spécial, lorsque les autres traitements ont échoué, ne conviennent pas, ou ne sont pas disponibles au Canada.

La cocaïne était la seule substance désignée qui, selon sa forme, était assujettie soit au Règlement sur les stupéfiants, soit à la partie J du Règlement sur les aliments et drogues. Les modifications uniformisent la réglementation des substances désignées en assujettissant toutes les formes de cocaïne aux exigences d’un seul règlement. La réglementation de toutes les formes de cocaïne conformément au Règlement sur les stupéfiants simplifie l’application du régime de contrôle en ce qui a trait à la cocaïne, tout en maintenant la surveillance réglementaire. Il n’est pas prévu que les modifications augmentent le risque de détournement ou d’activités non autorisées. De plus, les modifications profiteront à certains intervenants qui mènent ou qui demandent l’autorisation de mener des activités avec de la cocaïne puisqu’ils n’auront plus besoin de décider quel règlement s’applique en fonction de la forme de la substance, étant donné que toutes les formes de cocaïne seront assujetties au Règlement sur les stupéfiants.

Coûts

Les modifications ne changent pas le Programme d’accès spécial actuel, en dehors du fait que les praticiens pourront désormais demander l’accès à des drogues d’usage restreint en passant par le Programme d’accès spécial pour le traitement d’urgence de patients atteints de maladies graves ou mortelles. Les praticiens devront préparer et soumettre les demandes nécessaires et tenir des dossiers des activités portant sur toute drogue susceptible d’être autorisée. Il pourrait s’agir, par exemple, de documenter et de signaler les réactions des patients à une drogue d’usage restreint après l’administration de celle-ci. Ces activités donneront lieu à des coûts supplémentaires pour les praticiens. Sur une base individuelle, en moyenne, on s’attend à ce qu’un praticien ait besoin de moins de deux heures pour remplir une demande dans le cadre du Programme d’accès spécial; si une demande est approuvée, on estime que moins d’une heure est consacrée au respect des exigences réglementaires actuelles (par exemple déclaration d’une réaction indésirable à un médicament). Il est difficile d’estimer avec fiabilité le nombre total de demandes au Programme d’accès spécial susceptibles d’être reçues pour des drogues d’usage restreint au cours des dix prochaines années. D’après l’intérêt marqué pour les usages thérapeutiques potentiels des drogues d’usage restreint psychédéliques qui a été exprimé lors de la consultation publique en réponse à l’Avis d’intention, on s’attend à un regain d’intérêt pour le Programme d’accès spécial dans les mois qui suivront l’entrée en vigueur de ces modifications, suivi d’une stabilisation du nombre de demandes au fil du temps. Dans l’ensemble, on ne s’attend pas à ce que le coût différentiel total pour les praticiens soit élevé au cours des dix prochaines années.

On prévoit également que ces modifications donneront lieu à des coûts différentiels pour Santé Canada. Pour appuyer la mise en œuvre des modifications, Santé Canada mettra à jour les lignes directrices et d’autres documents, notamment des pages Web, qui se rapportent au Programme d’accès spécial et qui donnent aux intervenants de l’information au sujet des modifications réglementaires. Le ministère répondra également aux demandes de renseignements des intervenants en ce qui concerne les modifications.

En outre, le traitement des demandes présentées au Programme d’accès spécial générera des coûts supplémentaires pour Santé Canada. Ces coûts correspondent au temps que le Programme d’accès spécial consacrera à l’examen des demandes concernant des drogues d’usage restreint. De plus, le temps nécessaire au traitement d’une demande au Programme d’accès spécial est habituellement plus long pour un nouveau médicament ou une nouvelle indication. Étant donné que les intervenants se sont dits très favorables à l’accès aux drogues d’usage restreint par l’entremise du Programme d’accès spécial en réponse à l’Avis d’intention, Santé Canada s’attend à une augmentation du volume de demandes reçues par le Programme d’accès spécial au cours des mois qui suivront l’entrée en vigueur de ces modifications. Cependant, la hausse du volume devrait se tempérer et le volume devrait atteindre un niveau stable au fil du temps. Néanmoins, puisqu’on ne dispose pas de données historiques, il est impossible d’estimer de façon fiable le nombre de demandes concernant des drogues d’usage restreint que Santé Canada pourrait recevoir dans le cadre du Programme d’accès spécial.

Lentille des petites entreprises

Les cliniques médicales qui sont de petites entreprises seront touchées par ces modifications si les praticiens affiliés à ces cliniques demandent l’accès à des drogues d’usage restreint pour le traitement d’urgence de patients atteints de maladies graves ou mortelles. Des coûts seront associés à la préparation et à la présentation des demandes au Programme d’accès spécial au nom des patients, ainsi qu’au respect des exigences réglementaires existantes. Tel qu’il a été indiqué précédemment dans la section Avantages et coûts, on ne s’attend pas à ce que les coûts différentiels connexes soient élevés. Compte tenu du coût minime pour les petites entreprises et du fait que les modifications réglementaires ne changent pas les exigences actuellement imposées par le Programme d’accès spécial, ces modifications réglementaires ne comprennent pas d’autres assouplissements.

Règle du « un pour un »

Les modifications n’imposent aucune obligation qui alourdira le fardeau administratif des entreprises. Par conséquent, la règle du « un pour un » ne s’applique pas.

Coopération et harmonisation en matière de réglementation

Les modifications réglementaires ne sont liées à aucun plan de travail ni à aucun engagement dans le cadre d’un forum officiel de coopération des organismes de réglementation.

Le Programme d’accès spécial de Santé Canada, qui autorise la vente de drogues non approuvées pour des traitements d’urgence, permet au Canada d’agir conformément aux approches réglementaires internationales en ce qui concerne les médicaments destinés à l’usage humain, comme les approches suivies aux États-Unis, au sein de l’Union européenne, en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Irlande. Ces pays disposent généralement de programmes semblables pour autoriser un accès élargi aux drogues qui ne sont pas approuvées (comme c’est le cas en Australie avec le Special Access Scheme (disponible en anglais seulement), ou aux États-Unis avec le U.S. Food and Drug Administration’s Expanded Access Program (disponible en anglais seulement).

Évaluation environnementale stratégique

Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une analyse préliminaire a conclu qu’une évaluation environnementale stratégique n’est pas nécessaire.

Analyse comparative entre les sexes plus

On s’attend à ce que le retrait de l’interdiction d’accès aux drogues d’usage restreint par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial ait une incidence positive sur les Canadiens atteints de maladies graves ou potentiellement mortelles. Selon l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+), le rétablissement de l’accès aux drogues d’usage restreint par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial n’aura pas de répercussions disproportionnées ni de conséquences liées à la diversité sur des groupes ou des sous-groupes fondés sur l’origine ethnique, le genre, le sexe, l’âge ou toute autre caractéristique socio-économique.

Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service

Mise en œuvre

Les modifications réglementaires entreront en vigueur à la date de leur publication dans la Partie II de la Gazette du Canada. Au moment de la publication dans la Partie II de la Gazette du Canada, Santé Canada entreprendra des activités pour appuyer la mise en œuvre du règlement modifié, notamment en informant les intervenants des modifications et en mettant à jour la ligne directrice concernant le Programme d’accès spécial et toute autre page Web connexe, au besoin. Le ministère répondra également aux demandes des intervenants en ce qui concerne les modifications.

Conformité et application

En dehors de la communication des modifications aux intervenants, les modifications réglementaires ne donnent lieu à aucune nouvelle activité de conformité et d’application de la loi ni à aucun coût connexe.

Conformément au Règlement sur les aliments et drogues, le ministre peut remettre une lettre d’autorisation à un fabricant afin de permettre la vente d’une drogue non approuvée au praticien demandeur, à condition que le praticien fournisse l’information requise et que la demande soit approuvée à la suite d’une évaluation. Les modifications apportées au Règlement sur les aliments et drogues ne changeront pas ce processus. Cependant, le ministre pourra désormais remettre une lettre d’autorisation pour une drogue qui est une drogue d’usage restreint ou qui en contient une.

Aux termes de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, les fabricants nationaux de substances désignées doivent détenir une licence de distributeur valide. L’importation de substances désignées fabriquées à l’étranger (par exemple pour appuyer le traitement d’un patient par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial) nécessite un permis d’importation valide émis par Santé Canada. Seuls les distributeurs autorisés peuvent obtenir des permis d’importation. L’Agence des services frontaliers du Canada facilite le contrôle de la conformité concernant les substances désignées à la frontière.

Les praticiens qui demandent des drogues par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial sont responsables du suivi de leurs patients et des résultats de l’utilisation de la drogue. Le Règlement sur les aliments et drogues oblige les praticiens à signaler au fabricant et à Santé Canada le résultat obtenu chez le patient qui utilise la drogue ainsi que toute réaction indésirable constatée.

Le Règlement sur les aliments et drogues interdit de faire la publicité de drogues non autorisées, y compris celles qui sont autorisées dans le cadre du Programme d’accès spécial. Si un message concernant un produit de santé est considéré comme promotionnel, il est soumis aux dispositions relatives à la publicité de la Loi sur les aliments et drogues et aux règlements connexes.

Normes de service

Il n’existe aucune norme de service pour l’examen des demandes présentées au Programme d’accès spécial; toutefois, les demandes sont habituellement traitées dans un délai d’un à deux jours ouvrables suivant la réception. Étant donné que les drogues demandées dans le cadre de ce programme le sont aux fins de traitement d’urgence, Santé Canada tente de répondre aux demandes rapidement, en donnant la priorité aux plus urgentes. Le traitement est généralement plus long pour les demandes concernant des médicaments qui n’ont pas déjà été autorisés par l’intermédiaire du Programme d’accès spécial ou pour les nouvelles indications.

Personne-ressource

Jennifer Saxe
Directrice générale
Direction des substances contrôlées
Direction générale des substances contrôlées et du cannabis
Santé Canada
Immeuble principal de Statistique Canada
150, promenade du pré Tunney
Ottawa (Ontario)
K1A 0K9
Courriel : csd.regulatory.policy-politique.reglementaire.dsc@hc-sc.gc.ca