Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés : DORS/2019-148

La Gazette du Canada, Partie II, volume 153, numéro 11

Enregistrement
DORS/2019-148 Le 22 mai 2019

LOI SUR L’IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

C.P. 2019-574 Le 21 mai 2019

Attendu que le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, conformément au paragraphe 5(2) référence a de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés référence b, a fait déposer le projet de règlement intitulé Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, conforme en substance au texte ci-après, devant chaque chambre du Parlement,

À ces causes, sur recommandation du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration et en vertu du paragraphe 5(1), de l’alinéa 32a) et du paragraphe 89(1) référence c de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés référence b, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, ci-après.

Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés

Modifications

1 (1) Le sous-alinéa 200(1)c)(ii) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiésréférence 1 est remplacé par ce qui suit :

(2) L’article 200 du même règlement est modifié par adjonction, après le paragraphe (3), de ce qui suit :

Non-application de l’alinéa (3)e)

(3.1) L’alinéa (3)e) ne s’applique pas à l’étranger visé au paragraphe 207.1(1) qui a exercé un emploi au Canada sans autorisation ou permis ou a enfreint les conditions de l’autorisation ou du permis qui lui a été délivré.

2 Le même règlement est modifié par adjonction, après l’article 207, de ce qui suit :

Travailleur vulnérable

207.1 (1) Un permis de travail peut être délivré à l’étranger au Canada, en vertu de l’article 200, s’il y a des motifs raisonnables de croire que celui-ci est victime de violence dans le cadre de son emploi au Canada, ou risque de l’être, et si, selon le cas :

Membre de la famille d’un travailleur vulnérable

(2) Un permis de travail peut être délivré, en vertu de l’article 200, à l’étranger au Canada qui est membre de la famille de la personne visée aux alinéas (1)a) ou b).

3 Le paragraphe 299(2) du même règlement est modifié par adjonction, après l’alinéa k), de ce qui suit :

Entrée en vigueur

4 Le présent règlement entre en vigueur à 0 h 0 min 1 s, heure avancée de l’Est, le 4 juin 2019 ou, si l’enregistrement est postérieur, à 0 h 0 min 1 s, heure avancée de l’Est, le jour suivant la date de son enregistrement.

RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Le présent résumé ne fait pas partie du Règlement.)

Enjeux

Les travailleurs migrants jouent un rôle important dans l’économie canadienne en comblant les lacunes du marché du travail canadien, en renforçant les échanges commerciaux et en renforçant les liens culturels. Les travailleurs migrants titulaires d’un permis de travail lié à un employeur précis au Canada sont seulement autorisés à travailler pour l’employeur dont le nom figure sur leur permis de travail, ce qui fait en sorte qu’il leur est très difficile de changer d’emploi. Bien que la plupart des employeurs s’engagent à traiter correctement leurs travailleurs, le déséquilibre des pouvoirs que crée cette dynamique favorise l’employeur et peut faire en sorte qu’un travailleur migrant endure de l’inconduite, de la violence ou d’autres formes de représailles de la part de l’employeur. D’autres facteurs pourraient accentuer ce déséquilibre, notamment les obstacles linguistiques et les coûts liés à la navigation des mécanismes complexes de recours juridiques.

Pour surmonter ces difficultés, le gouvernement du Canada a entrepris une analyse approfondie des avantages et des désavantages des permis de travail liés à un employeur précis. Ces derniers demeurent un outil important dont se sert le Canada pour gérer la migration des travailleurs temporaires. Ces permis, jumelés aux examens du marché du travail, permettent de protéger le marché du travail (en veillant à ce que les employeurs cherchent d’abord à embaucher des citoyens ou des résidents permanents canadiens) et font en sorte que les employeurs respectent les conditions du programme (par exemple salaires, conditions de travail). Cependant, l’analyse confirme également que ce type de permis de travail peut créer certaines conditions dans lesquelles les risques de violence pourraient être plus élevés. Parmi ces conditions, notons les obstacles structuraux et financiers à la mobilité des travailleurs migrants qui sont victimes de violence liée à leur emploi (par exemple de la part d’un propriétaire d’entreprise, d’un superviseur, d’un recruteur ou d’une autre partie), ou qui sont à risque d’en être victimes.

À l’heure actuelle, les agents de migration ne disposent pas du pouvoir distinct de délivrer de nouveaux permis de travail aux travailleurs migrants qui subissent de la violence ou qui sont à risque d’en subir. Si un travailleur migrant décide de signaler une situation de violence auprès d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) ou d’Emploi et Développement social Canada (EDSC), une inspection de son employeur peut être déclenchée, ce qui peut donner lieu à l’imposition d’une interdiction temporaire ou permanente qui empêcherait l’employeur de pouvoir embaucher des travailleurs migrants. Dans le cas d’une interdiction, les permis de travail de tous les migrants travaillant pour cet employeur peuvent être révoqués, y compris celui de l’employé ayant signalé la situation. Sans permis de travail valide, le travailleur migrant fait face à une pression financière et à son renvoi potentiel du Canada, compromettant ainsi ses moyens de subsistance et son statut légal. Ces risques constituent des motifs puissants incitant les travailleurs migrants à cacher des autorités la violence qu’ils subissent. Dans certains cas, les travailleurs migrants peuvent se voir forcés de travailler ailleurs, « dans la clandestinité », c’est-à-dire sans autorisation. Comme de nombreuses personnes se trouvant dans ces situations éprouvent des difficultés financières, les frais liés à l’obtention d’un nouveau permis de travail représentent un véritable obstacle au changement d’emploi. Les travailleurs migrants craignent également des représailles de la part de leur employeur ou recruteur s’ils exposent la violence dont ils sont victimes, ce qui renforce leur propension à continuer à subir de la violence au travail ou à rester dans de piètres conditions de travail.

Contexte

La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés ainsi que le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (le Règlement) autorisent les étrangers à travailler au Canada de façon temporaire, à condition qu’ils satisfassent à toutes les exigences applicables. Dans la plupart des cas, les étrangers doivent obtenir un permis de travail, ce qu’ils peuvent faire au titre de deux programmes : le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) et le Programme de mobilité internationale (PMI). La principale différence entre les deux programmes est l’obtention ou non par l’employeur d’une étude d’impact sur le marché du travail (EIMT). Cette dernière est une évaluation qui permet de déterminer si un Canadien est disponible pour faire le travail et l’incidence probable du travailleur migrant sur le marché du travail canadien.

Au titre du PTET, les employeurs doivent demander une EIMT d’EDSC afin de démontrer, entre autres, que l’embauche de l’étranger aura une incidence positive ou neutre sur le marché du travail canadien et qu’ils ont déployé des efforts pour embaucher des citoyens et des résidents permanents canadiens avant d’essayer d’embaucher un travailleur migrant. Parmi les migrants qui travaillent souvent au titre du PTET, notons, entre autres, les travailleurs agricoles et les aides familiales.

Dans le cadre du PMI, les employeurs ne sont pas tenus de demander une EIMT avant de présenter une offre d’emploi à un étranger au Canada, puisqu’il est reconnu que, dans certaines circonstances, des avantages élargis pour le Canada du fait de l’embauche d’un étranger peuvent l’emporter sur l’obligation de réaliser cette étude. Les travailleurs migrants au titre du PMI comprennent les travailleurs visés par les accords ou les arrangements internationaux ou bilatéraux, les jeunes qui font un séjour vacances-travail ou qui participent à un échange, les étudiants de cycles supérieurs, les employés mutés au sein de leur entreprise, certains universitaires ainsi que des travailleurs dans les domaines religieux et de bienfaisance. Bien que le PTET soit géré conjointement par EDSC et IRCC, le PMI est géré uniquement par IRCC.

Tous les permis de travail délivrés au titre du PTET sont liés à un employeur précis. Les permis de travail délivrés au titre du PMI peuvent être ouverts ou liés à un employeur précis. Bien que le permis de travail ouvert permette au travailleur migrant de travailler pour n’importe quel employeur, le permis de travail lié à un employeur précis autorise le travailleur migrant à travailler seulement pour l’employeur qui l’embauche. En 2018, environ 340 000 permis de travail ont été délivrés au titre du PTET (environ 84 400) et du PMI (environ 255 700). Les titulaires d’un permis de travail lié à un employeur précis représentent environ 31 % des travailleurs migrants au titre du PMI.

Les employeurs qui embauchent des travailleurs migrants titulaires d’un permis de travail lié à un employeur précis au titre des deux programmes sont sujets à un régime de conformité de l’employeur afin d’aider à prévenir l’utilisation abusive des programmes et à promouvoir des conditions de travail sécuritaires et justes pour les travailleurs migrants. Les employeurs doivent déployer des efforts raisonnables pour fournir aux travailleurs étrangers temporaires un milieu de travail exempt de violence tel qu’énoncé à l’article 196.2 du Règlement et, plus précisément, exempt de ce qui suit :

Les employeurs dans le cadre des deux programmes font l’objet d’une inspection pour veiller à ce qu’ils respectent les conditions réglementaires, notamment l’exigence selon laquelle les employeurs doivent être véritablement actifs dans l’entreprise à l’égard de laquelle l’offre est faite, doivent respecter les lois qui régissent l’emploi et le recrutement des employés, doivent fournir les salaires, les emplois et les conditions de travail énoncés dans l’offre d’emploi, et de faire des efforts raisonnables pour créer des milieux de travail exempts de violence. Les employeurs qui ont enfreint des conditions peuvent subir des conséquences proportionnelles, par exemple des sanctions administratives pécuniaires et une interdiction temporaire ou permanente de pouvoir embaucher des travailleurs migrants.

Trois circonstances peuvent entraîner l’inspection d’un employeur : (i) la sélection aléatoire de l’employeur; (ii) un motif de soupçon de non-conformité de l’employeur (c’est-à-dire plainte ou dénonciation reçue par l’intermédiaire de la ligne d’information d’EDSC); (iii) des antécédents de non-conformité de l’employeur. Les régimes de conformité du PTET et du PMI sont tous deux dotés de mécanismes pour veiller à ce que les employeurs bénéficient de l’équité procédurale. Si un cas de non-conformité est décelé pendant une inspection, l’employeur a le droit de fournir de l’information additionnelle pour démontrer qu’il se conforme aux exigences et/ou justifier sa non-conformité dans certaines circonstances. Une fois que la décision définitive est prise, l’employeur y est lié, mais il peut demander un contrôle judiciaire.

À l’heure actuelle, lorsqu’un travailleur migrant titulaire d’un permis de travail lié à un employeur précis délivré au titre de l’un ou l’autre des programmes susmentionnés est victime de violence, ou risque de l’être, il peut le signaler aux autorités compétentes. Cependant, s’il souhaite quitter son emploi, il doit trouver un autre employeur qui serait prêt à l’embaucher et à soumettre une nouvelle demande d’EIMT (s’il y a lieu) et il doit présenter une demande en vue d’un nouveau permis de travail. Il s’agit d’un processus qui peut être long et coûteux, ce qui peut dissuader les travailleurs de signaler la violence. Dans certains cas, les travailleurs migrants pourraient se sentir contraints de travailler ailleurs sans autorisation, plutôt que d’endurer ou de signaler la violence.

Le 19 septembre 2016, le Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées (HUMA) a présenté son rapport sur le PTET. Ce rapport contient 21 recommandations visant à améliorer le PTET afin de mieux répondre aux besoins du marché du travail canadien, tout en mettant l’accent sur de meilleures protections pour les travailleurs étrangers au Canada. La lettre de mandat du ministre d’IRCC datée de février 2017 comportait un engagement en vue de collaborer avec le ministre d’EDSC et les intervenants afin de donner suite aux recommandations formulées par HUMA.

En ce qui concerne le renforcement de la protection des travailleurs migrants, le gouvernement a souscrit à la recommandation du Comité en vue de la prise de mesures additionnelles pour empêcher que les travailleurs migrants, particulièrement les travailleurs vulnérables, soient victimes de violence ou soient soumis à des conditions de travail dangereuses lorsqu’ils travaillent temporairement au Canada.

Mettant l’accent sur cet engagement, le budget de 2018 a souligné l’obligation du Canada à veiller à ce que les travailleurs migrants soient conscients de leurs droits et à ce qu’ils soient protégés contre la violence. Dans le cadre du budget, 194,1 millions de dollars sur cinq ans (à compter de 2018-2019) et 33,2 millions de dollars par année par la suite ont été réservés à cette fin. De plus, le gouvernement a investi 3,4 millions de dollars sur deux ans afin de permettre à EDSC de réaliser un projet pilote visant à établir un réseau d’organismes de soutien à l’intention des travailleurs migrants qui pourraient subir de la violence la part de leur employeur.

C’est dans le contexte de l’engagement soutenu du gouvernement du Canada à l’égard de la protection des travailleurs migrants que sont adoptées les présentes modifications réglementaires.

Objectif

Les objectifs des modifications réglementaires sont les suivants :

Description

Le Règlement est modifié aux fins suivantes :

Une fois le pouvoir réglementaire en place, les agents pourront délivrer un permis de travail ouvert dispensé de droits lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un travailleur migrant subit ou risque de subir de la violence dans le cadre de leur emploi au Canada. Les personnes qui demanderont ce permis seront exemptées des frais de traitement de permis de travail et, par conséquent, seront également exemptées des frais ouvrant droit aux privilèges du permis de travail ouvert. Les travailleurs migrants pourront présenter une demande en vue d’obtenir le permis de travail pour travailleurs vulnérables et les demandes seront évaluées au cas par cas, en fonction des éléments de preuve portés à la connaissance de l’agent. Les membres de la famille d’un travailleur migrant pourront recevoir le permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables uniquement s’ils se trouvent déjà au Canada et si le travailleur migrant satisfait à tous les critères d’admissibilité.

Les travailleurs migrants qui possèdent un permis de travail lié à un employeur précis, dans le cadre du PTET ou du PMI, ou ceux qui ont présenté une demande de renouvellement d’un tel permis (c’est-à-dire qui ont un statut implicite) et qui sont par conséquent autorisés à travailler au Canada sans permis pourraient présenter une demande de permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables. Si cette demande était approuvée, le travailleur migrant serait autorisé à travailler pour n’importe quel employeur pendant toute la période indiquée sur le permis de travail délivré par l’agent. Afin de continuer à travailler avec autorisation après l’expiration de ce permis de travail ouvert, ils devront obtenir un autre permis de travail ou quitter le Canada, selon la procédure normale.

Les travailleurs migrants pourraient recevoir un permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables même s’ils ont exercé un emploi au Canada sans autorisation ou permis. Ainsi, le fait d’avoir travaillé au Canada sans autorisation ne serait pas retenu contre eux dans le cadre de leur demande de permis, étant donné que cela pourrait constituer un élément clé de leur déclaration de violence.

La délivrance d’un permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables dans de telles circonstances n’entraînerait pas une conclusion automatique de non-conformité de l’employeur; cependant, elle peut mener à une inspection visant à vérifier la conformité de l’employeur avec les conditions du programme. Si une décision de conformité est finalement prise, cela n’affecterait pas la validité du permis de travail ouvert délivré au travailleur migrant.

Élaboration de la réglementation

Consultation

Le projet de règlement a été publié, au préalable, dans la Partie I de la Gazette du Canada, le 15 décembre 2018 pour une période de 30 jours au cours de laquelle des commentaires pouvaient être formulés. IRCC a également mené de vastes consultations auprès des intervenants, notamment en invitant (par courriel) divers intervenants du milieu à fournir par écrit leurs commentaires. Quarante-six personnes et organisations ont commenté les modifications proposées dans le cadre de la publication préalable, y compris des organisations de soutien des travailleurs migrants, des associations industrielles, des groupes d’employeurs, des syndicats, des représentants juridiques et des bureaux d’avocats et des experts indépendants du monde universitaire. En outre, IRCC a effectué sept consultations en personne à travers le pays dans le but de recueillir le point de vue des travailleurs migrants et des organisations qui leur viennent en aide. Des tables rondes ont été organisées à Vancouver, Edmonton, Winnipeg, Toronto, Montréal et Halifax. Les provinces et les territoires ont également été consultés lors de discussions multilatérales. Enfin, EDSC a collaboré à l’élaboration du projet réglementaire et l’appuie, y compris la nouvelle disposition concernant le travail sans autorisation.

En général, les intervenants ont accueilli favorablement le projet réglementaire, y compris l’intention et les objectifs qui le sous-tendent. La plupart d’entre eux sont d’avis que le projet est un pas dans la bonne direction en matière de protection des droits des travailleurs migrants. Dans l’ensemble, les intervenants ont reconnu que les modifications proposées viendraient combler une lacune dans le Règlement en facilitant pour les travailleurs migrants victimes de violence l’obtention d’un permis de travail auprès d’un autre employeur. Pour plusieurs d’entre eux, jusqu’ici, le Règlement a mis davantage l’accent sur le respect par les employeurs des conditions du programme plutôt que sur l’aide offerte aux travailleurs migrants victimes de violence. À noter que les intervenants ont salué les exemptions des droits de permis comme moyen d’aplanir les obstacles financiers et recommandent le traitement rapide des demandes de permis pour travailleurs vulnérables, ce qui permettra d’intervenir sans tarder dans des situations d’urgence.

Les intervenants ont soulevé un certain nombre de questions et de préoccupations, lesquelles sont regroupées par thème ci-dessous. Une modification additionnelle a été apportée au Règlement en réponse à l’inquiétude concernant l’admissibilité au permis pour les travailleurs migrants qui pourraient être forcés de travailler sans autorisation. Cette préoccupation a été soulevée par plusieurs intervenants, par écrit ou de vive voix dans le cadre des tables rondes, et est traitée sous la rubrique « Critères d’admissibilité » ci-dessous. La plupart des autres préoccupations ne sont pas de nature réglementaire; par conséquent, IRCC y répondra non par des modifications au Règlement, mais par exemple, par le biais de directives opérationnelles disponibles au public et de produits de communication et de sensibilisation.

Définition de « violence » et de « risque de violence »

La majorité des intervenants, notamment des organisations de soutien des travailleurs migrants, des groupes d’employeurs et des représentants juridiques, ont soulevé des questions quant à la définition de « violence » et de « risque de violence » et de l’évaluation des déclarations à cet effet, en prenant soin de souligner la nécessité de décrire ces termes avec précision pour les agents d’IRCC, les travailleurs migrants et les employeurs.

Le terme « violence » est défini à l’article 196.2 du Règlement et inclut la violence physique, sexuelle, psychologique et l’exploitation financière. Aucune modification à cette définition n’est proposée. Toutefois, pour plus de certitude sur l’application des dispositions portant sur la violence, IRCC apportera des précisions à la définition de « violence » et « risque de violence », notamment en fournissant des exemples du type de preuve qui peut être présentée à ces fins, dans les directives opérationnelles. Ces dernières, appelées Instructions relatives à l’exécution des programmes, seront disponibles sur le site web d’IRCC à l’entrée en vigueur des modifications réglementaires. Ces instructions aident les agents à interpréter les règlements et sont mises à la disposition du public sur le site Web d’IRCC à titre de référence. Les agents auront également reçu, avant l’entrée en vigueur des modifications réglementaires, de la formation sur la façon d’évaluer les cas de violence.

Déclaration de violence frauduleuse

Un nombre appréciable d’intervenants, y compris au sein des groupes d’employeurs et d’organisations de soutien des travailleurs migrants, ont exprimé leurs craintes que des demandeurs présentent une fausse déclaration de violence dans le but d’obtenir un permis de travail ouvert. En plus de ce risque de déclaration non fondée de violence, certains intervenants ont indiqué qu’il existe un risque que des intermédiaires sans scrupules fournissent, contre rémunération, de fausses informations sur le programme et qu’ils encouragent des demandeurs à présenter une déclaration non fondée de violence, tentant ainsi de soutirer de l’argent des travailleurs migrants. Toutes les parties s’entendent pour dire que des déclarations de violences frauduleuses auraient des conséquences négatives sur les employeurs et les demandeurs de bonne foi.

IRCC veillera au maintien de l’intégrité du permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables en établissant une stratégie d’atténuation des risques liés aux déclarations de violence frauduleuses. D’abord, les agents recevront de la formation sur la façon d’évaluer ces demandes de permis, notamment en ce qui concerne les critères d’admissibilité et les exemples de preuve pouvant être présentée à l’appui d’une demande. Puis, à l’appui de cette formation, des directives opérationnelles précises seront fournies dans des Instructions relatives à l’exécution des programmes, qui seront mises à la disposition du public afin d’assurer la transparence du processus décisionnel. Une stratégie de communication sera également élaborée afin d’assurer que les travailleurs migrants soient informés de la nouvelle option et qu’ils sachent comment y avoir accès, ce qui réduirait le besoin de recourir à des intermédiaires. L’élément principal du plan de communications aura une portée multilingue et soulignera les composantes clés de cette nouvelle option, par exemple, l’exemption des frais associés à la demande de permis. Enfin, IRCC surveillera de près les demandes de permis pour travailleur vulnérable et les décisions prises à l’égard de ces demandes au cours de la mise en place du nouveau permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables, et modifiera les directives opérationnelles et la procédure au besoin.

Rôle des tierces parties

Les intervenants ont demandé si les tierces parties qui viennent en aide aux travailleurs migrants, telles que les agences d’intégration à but non lucratif ou le bureau d’un médiateur, pourraient participer au processus. Les intervenants ont souvent souligné le rôle des tierces parties dans un programme semblable actuellement en place en Colombie-Britannique. Par exemple, certains intervenants ont demandé si un financement pourrait être accordé par le gouvernement fédéral à des groupes à but non lucratif qui aideraient les travailleurs migrants à remplir les demandes de permis et veilleraient à ce qu’ils soient informés du nouveau permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables. D’autres ont suggéré que soit mis en place un rôle de « gardien » que pourraient exercer des tierces parties afin de protéger le programme de la fraude.

Bien que le gouvernement du Canada reconnaît le rôle que jouent à l’heure actuelle les intervenants, soit les services qu’ils offrent aux travailleurs migrants et surtout le point de contact initial et le plus sûr qu’ils constituent pour ces derniers, la présente initiative ne prévoit pas de rôle officiel pour les tierces parties.

Accessibilité et sensibilisation

Les intervenants ont identifié un certain nombre d’obstacles auxquels sont confrontés, ou pourraient l’être, les travailleurs migrants en ce qui concerne l’accès aux services en général, et au permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables en particulier, notamment : l’accès à l’information (y compris dans les langues lues ou parlées par les travailleurs), l’aide et les ressources, l’isolation sociale et géographique, l’accès à des ressources et appareils permettant de faire des demandes, et la peur associée à la démarche de déclarer la violence auprès des autorités. La sensibilisation et la formation des employeurs ont également été soulignées.

Les travailleurs migrants seront encouragés à recourir aux services de soutien qui existent au Canada et IRCC collaborera avec les fournisseurs de service au cours de la mise en place du nouveau permis pour faire connaître ce dernier. La stratégie de communication viendra appuyer cette collaboration : IRCC produira des vidéos en plusieurs langues que les intervenants pourront partager avec les travailleurs migrants partout au Canada.

Il est important de noter que le nouveau permis de travail vient combler une lacune précise dans le système d’immigration, c’est-à-dire qu’il vise à fournir aux travailleurs migrants qui possèdent un permis de travail pour un employeur en particulier et qui se trouvent en situation de violence l’autorisation de travailler pour un autre employeur. Bien que le nouveau permis a pour but d’atténuer les répercussions de la violence et peut également encourager les employeurs à respecter les conditions des programmes de travail temporaire, il est clair que la nouvelle option ne répond pas à toutes les préoccupations concernant les travailleurs migrants au Canada.

Durée de validité du permis

Les intervenants se sont dits préoccupés du fait que la durée du permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables ne soit pas établie dans le Règlement et ont souligné qu’elle doit être suffisamment longue pour permettre aux travailleurs migrants de trouver un autre employeur et d’obtenir un permis de travail. Plusieurs d’entre eux ont proposé une période de validité d’un an.

Pour tous les permis de travail délivrés en vertu du Règlement, la durée du permis est établie par l’agent, à sa discrétion. IRCC inclura dans les directives opérationnelles des instructions pour les agents qui traitent ces demandes afin qu’ils tiennent compte de divers facteurs au moment d’établir la période de validité du permis. L’accent sera mis sur le fait que le permis de travail pour travailleurs vulnérables constitue une mesure de transition. Les agents seront encouragés à tenir compte notamment du temps qu’il faudra pour trouver un nouvel employeur, traiter une demande d’EIMT et présenter une nouvelle demande de permis de travail. Les directives opérationnelles expliqueront comment les permis de travail seront délivrés et fourniront des détails sur la période de validité. Toutefois, conformément aux autres directives en place, chaque cas sera évalué au cas par cas, afin de tenir compte des cas exceptionnels.

Critères d’admissibilité

De nombreux intervenants se sont dits préoccupés par les critères d’admissibilité établis pour l’obtention du permis de travail pour travailleurs vulnérables, à leur avis trop restrictifs. Ils ont cité notamment l’exigence pour les travailleurs migrants de posséder un permis de travail valide précisant le nom de leur employeur ou d’avoir présenté une demande de renouvellement de permis, ce qui exclut dès lors les travailleurs qui ont perdu leur statut et n’ont plus l’autorisation de travailler au Canada. Certains intervenants ont soulevé la question des travailleurs migrants qui, dans le cadre de la violence dont ils sont victimes, ont été forcés de travailler sans autorisation et qui, en communiquant cette information à IRCC, pourraient se rendre inadmissibles à l’obtention d’un permis de travail au Canada.

IRCC réitère que le permis de travail pour travailleurs vulnérables n’est pas un moyen pour les travailleurs migrants qui n’ont plus l’autorisation de travailler légalement au Canada de rétablir leur statut. Par conséquent, IRCC n’a pas l’intention d’élargir les critères d’admissibilité dans le Règlement pour inclure les travailleurs migrants sans permis de travail valide.

IRCC reconnaît qu’au moment de présenter une demande de permis de travail pour travailleurs vulnérables certains travailleurs migrants devront déclarer avoir travaillé sans autorisation, car cela pourrait constituer un élément clé de leur déclaration de violence. À l’heure actuelle, le fait de travailler sans autorisation au Canada peut dans certains cas rendre un demandeur inadmissible à un permis de travail en vertu du Règlement. Par conséquent, le Règlement a été modifié afin de permettre aux travailleurs migrants dans une telle situation d’avoir accès au permis de travail pour travailleurs vulnérables. Il ne s’agit pas d’une modification substantielle de la politique, mais plutôt d’une correction venant combler une lacune imprévue dans le projet réglementaire, et cette modification cadre avec les objectifs de la politique telle qu’elle a été conçue.

Les intervenants ont également recommandé d’autres solutions au problème de la violence envers les travailleurs migrants, mais ces recommandations dépassent le cadre de la nouvelle option, soit du permis de travail pour travailleurs vulnérables. Parmi ces dernières se trouvent : l’octroi de la résidence permanente dès l’arrivée au Canada, des permis de travail ouverts pour tous les travailleurs, des permis autorisant le travail dans un secteur ou un type d’emploi plutôt que pour un employeur précis et un permis de travail précisant le nom d’un employeur exempt de frais. IRCC considère que ces recommandations dépassent le cadre du projet réglementaire parce qu’elles abordent des questions plus larges au sujet des programmes et des permis de travail en général. Le nouveau permis vise essentiellement à fournir, au cas par cas, aux travailleurs migrants qui subissent ou risquent de subir de la violence, un moyen de sortir de la situation et d’aller travailleur ailleurs. Il ne vise pas une refonte du PTET ou du PMI. Enfin, certains intervenants ont recommandé que le nouveau permis de travail pour travailleurs vulnérables soit mis en place à titre de projet pilote. IRCC souligne que le projet réglementaire s’est en partie inspiré d’expériences semblables, mais à plus petite échelle, en Colombie-Britannique et en Alberta.

Analyse de la réglementation

Lentille des petites entreprises

La lentille des petites entreprises ne s’applique pas à cette initiative, car aucun fardeau administratif ni aucun coût administratif additionnels ne seront imposés aux petites entreprises.

Règle du « un pour un »

La règle du « un pour un » ne s’applique pas à cette modification réglementaire, car celle-ci n’a aucun effet sur les coûts administratifs imposés aux entreprises.

Évaluation environnementale stratégique

Suivant La directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une analyse préliminaire a été effectuée et, selon ses conclusions, il n’est pas nécessaire de procéder à une évaluation environnementale stratégique.

Évaluation des répercussions des traités modernes

Conformément à la Directive du Cabinet sur l’approche fédérale pour la mise en œuvre des traités modernes, IRCC a effectué une évaluation des répercussions des traités modernes pour le projet réglementaire. L’évaluation n’a révélé aucune répercussion sur les obligations du Canada à ce chapitre.

Analyse comparative entre les sexes plus (ACS+)

On s’attend à ce que la nouvelle option ait des répercussions indirectes variées sur les différents genres correspondant à diverses identités intersectionnelles. Le déséquilibre des pouvoirs qui est, d’une certaine manière, inhérent à toutes les relations d’emploi est plus marqué pour les travailleurs migrants en raison de leur statut temporaire au Canada et, dans le cas des titulaires de permis de travail précisant le nom de l’employeur, de la nature conditionnelle de leur autorisation de travailler pour un seul employeur. Ce déséquilibre peut être davantage exacerbé par des facteurs tels que les faibles niveaux de compétences professionnelles et linguistiques, le peu de connaissances qu’ont les travailleurs migrants au sujet de leurs droits et les renseignements erronés qui circulent. La proposition devrait toucher dans une certaine mesure des groupes de travailleurs migrants vulnérables, qui auraient alors la possibilité d’obtenir un permis de travail ouvert s’ils subissent ou risquent de subir de la violence.

Les travailleurs migrants dans le cadre du PTET et du PMI peuvent se heurter à des difficultés qui les rendent vulnérables lorsqu’ils travaillent au Canada. Les facteurs liés au sexe et aux identités intersectionnelles (par exemple l’âge, la race, le faible niveau de compétences professionnelles et linguistiques et/ou le faible niveau salarial) peuvent aggraver la violence en milieu de travail. L’expérience qualitative que les travailleurs migrants vivent au Canada en tant que personnes « vulnérables », « exploitées », « dans une situation précaire » et exposées au risque de subir de la violence de la part de leurs employeurs est clairement énoncée et bien établie dans les ouvrages universitaires produits au cours des deux dernières décennies, en particulier dans le cas des travailleurs agricoles et des aides familiales.

Cependant, puisque les travailleurs migrants craignent de dénoncer la violence dont ils sont victimes, il n’y a pas suffisamment de données quantitatives fiables pour tirer des conclusions à cet égard. Cela dit, des données qualitatives probantes semblent indiquer qu’il y a des groupes particulièrement vulnérables, notamment les aides familiales, qui sont en quasi-totalité des femmes et qui sont plus susceptibles de subir de la violence sexuelle et physique en raison de leurs conditions de vie et de travail. Comme l’un des principaux objectifs des modifications réglementaires consiste à offrir aux travailleurs migrants qui subissent ou risquent de subir de la violence un moyen de se sortir de cette situation, on prévoit que cette vulnérabilité serait atténuée jusqu’à un certain point.

En 2018, environ 340 000 permis de travail ont été délivrés dans le cadre du PTET et du PMI. Environ 163 900 d’entre eux précisaient le nom d’un employeur, et, parmi ces derniers, 23 % ont été délivrés à des femmes. Dans le cadre du PTET, les femmes représentaient près de 17 % des travailleurs dans tous les niveaux de compétences. Du côté du PMI, les hommes étaient nettement supérieurs en nombre aux femmes dans bien des secteurs. Cette situation pourrait être attribuable à la nature historiquement sexospécifique de certaines professions et politiques dans les pays sources, aux responsabilités des soins aux enfants traditionnellement réservées aux femmes et à l’accès à l’éducation. La disparité pourrait aussi avoir été amplifiée par les réformes introduites en juin 2014, lesquelles prévoyaient la réduction du nombre d’aides familiales bénéficiant d’un statut temporaire (90 % de femmes) et l’augmentation du nombre de travailleurs agricoles (plus de 90 % d’hommes). La nouvelle option devrait aider les travailleurs migrants dans ces secteurs, qui ont tendance à créer des conditions de vulnérabilité. Comme jusqu’ici l’incidence de travail non autorisé au Canada n’est documentée que par de simples constats, IRCC ne peut prévoir de façon claire les répercussions que pourrait avoir le projet réglementaire sur les travailleurs migrants selon leur genre. Toutefois, IRCC fera un suivi de la situation à mesure que des données plus scientifiques seront recueillies.

Après la mise en place de la nouvelle option, IRCC en analysera les aspects liés aux sexes dans le cadre des activités régulières de suivi.

Protection des renseignements personnels

Les considérations entourant la protection des renseignements personnels seront prises en compte dans l’évaluation des facteurs relatifs à la vie privée pour le PMI, étant donné que le permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables sera accordé dans le cadre de ce programme, évaluation qui précisera comment les renseignements personnels seront protégés.

Justification

Atténuer les facteurs liés à l’immigration qui tendent à décourager les travailleurs de quitter leur employeur et de signaler la violence aux autorités

Il est bien connu que les travailleurs migrants munis d’un permis de travail lié à un employeur précis craignent de subir des représailles ou d’être expulsés s’ils dénoncent leur employeur, et que bon nombre d’entre eux sont incapables d’assumer les conséquences financières de leur décision de quitter leur employeur, par exemple dans les situations d’endettement découlant de sommes payées aux recruteurs.

Le nouveau permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables vise à atténuer cette crainte qui tend à décourager le signalement de la violence en apportant des modifications réglementaires pour créer un permis de travail ouvert destiné précisément aux travailleurs migrants qui subissent ou risquent de subir de la violence, lequel leur permettrait de se sortir de ces situations néfastes sans perdre leur sentiment de sécurité élémentaire à l’égard de leur séjour au Canada. Les modifications réglementaires viennent également lever tous les frais exigés pour la demande de permis de travail de manière à réduire au minimum les obstacles financiers empêchant les travailleurs migrants de se prévaloir de la nouvelle option.

Par ailleurs, cet incitatif à signaler la violence aux autorités compétentes favorisera et renforcera les objectifs des régimes de conformité actuels des employeurs en ce qui a trait à la protection des travailleurs. En effet, un plus grand nombre de travailleurs migrants pourraient se sentir plus à l’aise de dénoncer la violence dont ils sont victimes et d’informer les autorités de leur situation, ce qui viendrait renforcer l’intégrité des décisions et des résultats en matière de conformité. Sans ces signalements, il est possible que les cas ou les risques de violence ne soient jamais portés à l’attention du gouvernement.

Réduire au minimum les différences dans la réglementation sur la protection des travailleurs entre les provinces et territoires du Canada

Il y a deux précédents pour les présentes modifications réglementaires au niveau provincial. Aux termes des accords conclus entre le Canada et les provinces et territoires sur l’immigration, les provinces peuvent négocier les annexes concernant les travailleurs étrangers afin qu’IRCC, EDSC et les provinces et territoires disposent d’un mécanisme officiel pour collaborer à améliorer les mesures de protection des travailleurs tout en donnant suite aux priorités et aux besoins urgents en main-d’œuvre des provinces et des territoires.

Au chapitre de la protection des travailleurs, les annexes concernant les travailleurs étrangers font mention d’une collaboration fédérale-provinciale-territoriale plus étroite, notamment lorsqu’il s’agit d’élaborer des programmes et des initiatives visant à mieux faire connaître les services provinciaux aux travailleurs migrants et à accroître leur accès à ces services, et d’informer les employeurs de leurs obligations aux termes des lois fédérales et provinciales ou territoriales à l’égard des travailleurs migrants. La disposition relative au permis de travail ouvert accordé aux travailleurs migrants qui risquent de subir de la violence de la part d’un employeur soupçonné de ne pas se conformer aux lois fédérales ou provinciales en vigueur, prévue dans l’annexe concernant les travailleurs étrangers de la Colombie-Britannique, constitue un excellent exemple d’initiative fédérale-provinciale. Ce type de disposition existait également dans une ancienne annexe de l’accord de collaboration Canada–Alberta sur les travailleurs étrangers (laquelle a pris fin en 2015). Les présentes modifications réglementaires reposent sur les leçons tirées de ces initiatives provinciales en Colombie-Britannique et en Alberta.

Les modifications réglementaires réduiront au minimum les différences entre les provinces et les territoires en offrant aux travailleurs migrants au Canada qui subissent ou risquent de subir de la violence la possibilité d’obtenir un permis de travail ouvert.

Il est essentiel de réduire au minimum cette différence, car les travailleurs migrants viennent travailler au Canada dans le cadre de programmes fédéraux; c’est pourquoi toute différence entre les provinces et les territoires devrait être réduite autant que possible, surtout lorsqu’il s’agit de donner accès à la protection.

Du point de vue international, la nouvelle option du Canada serait la première en son genre dans ce domaine, mais concorderait largement avec les positions adoptées par les pays qui partagent la même optique sur la protection dans le contexte de la violence et de l’exploitation dont sont victimes les travailleurs migrants. Par exemple, des pays aux vues similaires (l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni) se sont engagés publiquement à améliorer l’accès des travailleurs migrants à l’information sur leurs droits et ont apporté des changements aux politiques et aux programmes afin de faciliter cet échange de renseignements. Par exemple, l’Australie est passée à des voies de communication multilingues pour permettre aux travailleurs migrants de se renseigner et de dénoncer de façon anonyme les employeurs problématiques. Le Canada viendrait compléter ces initiatives axées sur l’accès à l’information sur les droits en offrant des mesures qui permettraient aux travailleurs migrants qui subissent ou risquent de subir de la violence dans le cadre de leur emploi d’obtenir plus facilement l’autorisation de travailler et de maintenir leur statut.

Accroître l’accessibilité des parcours légaux pour les travailleurs migrants victimes de violence

À l’heure actuelle, des travailleurs migrants victimes de mauvais traitements se trouvent dans des situations extrêmes qui pourraient les pousser à quitter leur employeur et à travailler dans la clandestinité (sans autorisation) en raison du peu d’options qui s’offrent à eux pour obtenir un permis de travail. En particulier, les risques associés au travail non autorisé au Canada (notamment l’incapacité d’accéder aux services sociaux et de santé, l’insécurité financière et le risque d’être renvoyé du Canada) pourraient être plus importants que ceux auxquels ils s’exposent en demeurant dans une situation de violence.

Les modifications réglementaires visent à atténuer le risque que les travailleurs migrants s’exposent à des conditions qui les obligeraient à vivre dans la clandestinité et à travailler au Canada sans statut ni autorisation.

Coûts et avantages

Coûts limités et autres répercussions

En se basant sur le nombre de participants aux programmes antérieurs et existants en Alberta et en Colombie-Britannique (ce qui représente un total combiné de 100 permis de travail ouverts délivrés sur six ans) et sur le nombre anticipé de participants supplémentaires à la suite de la mise en œuvre à l’échelle nationale, IRCC estime qu’environ 500 demandes de permis de travail par année seront présentées par des travailleurs migrants affirmant subir ou être à risque de subir de la violence. Pour plus de clarté, il s’agit d’une estimation et non du maximum de demandes qu’IRCC acceptera de traiter.

Les modifications réglementaires entraîneront des coûts supplémentaires mineurs pour IRCC, entre autres des coûts associés au traitement des demandes de permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables, ainsi que des coûts associés à la mise en œuvre, à la communication et à la transition visant ce permis de travail ouvert. Ces coûts seront absorbés dans les limites des niveaux de référence existants d’IRCC.

La mise en place du permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables n’entraînera pas une hausse supplémentaire du nombre net d’inspections de la conformité menées par IRCC et EDSC chaque année. Toute inspection déclenchée en raison de la délivrance d’un tel permis fera plutôt l’objet d’une priorité, tout simplement, dans le cadre de l’enveloppe existante des inspections de la conformité prévues chaque année. En d’autres termes, le nombre d’inspections de la conformité menées chaque année ne changera pas à la suite de la mise en place du permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables. À la suite de la délivrance d’un tel permis, des employeurs non conformes pourraient perdre des travailleurs pour lesquels ils ont payé des frais en vue de leur embauche; toutefois, on considère que de tels coûts ne s’inscrivent pas dans la portée du projet.

En règle générale, on ne s’attend pas à ce que les employeurs qui se conforment aux conditions du PTET et du PMI doivent engager des coûts en raison des présentes modifications réglementaires. Cependant, il existe un risque faible que les travailleurs migrants fassent de fausses allégations de violence pour obtenir un permis de travail ouvert, ce qui pourrait entraîner une situation où un employeur conforme perd un travailleur pour lequel il a payé le recrutement. Ce risque devrait être faible pour plusieurs raisons. La délivrance d’un permis de travail ouvert ne garantit pas un nouvel emploi au Canada, car il n’offre que la possibilité de travailler légalement au pays pour une période limitée. Un bris d’emploi a un prix sur le plan financier et social, et le travailleur serait toujours dans l’incertitude par rapport à son statut d’immigration et à sa subsistance. De plus, les fausses déclarations relatives à une demande présentée en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés constituent un motif d’interdiction de territoire, ce qui pourrait entraîner la perte du statut temporaire d’un travailleur au Canada.

Les présentes modifications réglementaires n’imposeront aucun coût direct aux Canadiens, aux résidents permanents ou aux consommateurs. Les travailleurs migrants à qui on a délivré un permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables auront accès temporairement au marché du travail canadien; cependant, ce permis de travail se veut une mesure de transition et n’a pas pour but de permettre aux travailleurs migrants d’avoir accès au marché du travail canadien de façon permanente. De plus, le nombre de permis que l’on s’attend à délivrer chaque année (environ 500) ne devrait pas avoir une incidence notable sur le marché du travail canadien. Si un travailleur migrant titulaire d’un permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables n’était pas en mesure de trouver un nouvel emploi ou ne satisfaisait pas aux conditions pour une prolongation, le travailleur migrant devra quitter le Canada, conformément à la procédure normale.

Avantages pour les travailleurs migrants, les employeurs canadiens et les travailleurs canadiens

Outre les avantages indiqués à la section « Justification » ci-dessus, les présentes modifications devraient avoir une incidence favorable sur les milieux de travail, la société et la culture. Ces mesures permettraient de renforcer la confiance des travailleurs migrants et de la population par rapport à la façon dont la société canadienne traite les travailleurs migrants.

Le permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables vient compléter l’éventail d’outils dont dispose le gouvernement du Canada pour assurer l’intégrité du PTET et du PMI, ce qui accroîtra la réputation du pays en tant que destination sûre pour les travailleurs migrants. Bien que les conditions de travail et les environnements de travail des travailleurs migrants au Canada soient principalement influencés par les employeurs, le permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables conférera au gouvernement du Canada un mécanisme permettant aux travailleurs de se sortir en toute sécurité d’un milieu de travail violent.

Étant donné qu’elles offrent un mécanisme qui permet aux travailleurs migrants de quitter les milieux de travail où il y a de la violence, entre autres des conditions défavorables pour la santé et la sécurité, les modifications réglementaires devraient améliorer le bien-être des travailleurs migrants au Canada. Les employeurs seront davantage incités à se conformer aux conditions du programme et à ne pas maltraiter les travailleurs migrants ou à ne pas leur faire subir de la violence. Puisque les lieux de travail comptent rarement des travailleurs migrants seulement, il pourrait y avoir des retombées favorables sur les travailleurs canadiens, notamment des milieux de travail plus respectueux et plus sains. La mesure faciliterait également la participation des travailleurs migrants victimes de violence, ou exposés à un risque de violence, à toute inspection ou enquête pertinente visant leur ancien employeur ou recruteur (il convient de souligner qu’ils ne seraient pas obligés de le faire) en réduisant la crainte et le risque perçus de révocation du permis de travail et de renvoi du Canada.

Tout bien pesé, les avantages attendus à la suite de la mise en place du permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables l’emportent sur les faibles coûts que devra engager le gouvernement en lien avec la mise en œuvre ainsi que sur les coûts de traitement permanents et sur les coûts potentiels associés au risque mineur de fausses allégations.

Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service

Les dispositions réglementaires entrent en vigueur le 4 juin 2019. Une fois les dispositions réglementaires en vigueur, les agents pourront délivrer des permis de travail ouverts s’ils ont des motifs raisonnables de croire qu’un travailleur migrant est victime de violence ou risque d’y être exposé. Dans le cadre de la mise en œuvre de cette nouvelle option, une formation sera dispensée aux agents de migration qui seront chargés de traiter ces demandes.

En ce qui a trait aux résultats à court et à moyen terme, on s’attend à ce que les travailleurs migrants dans ces situations aient accès à des permis de travail ouverts qui les aideront à se sortir de situations de violence, à ce que les employeurs non conformes soient détectés et à ce que des mesures soient appliquées en conséquence. À long terme, les travailleurs migrants devraient être mieux protégés, et les employeurs devraient se conformer davantage aux exigences des programmes. Le nombre de travailleurs migrants qui signalent des situations de violence, ou de risques de violence, et le nombre de permis de travail ouverts délivrés feront l’objet d’un suivi étroit. Dans le cadre des stratégies de mesure du rendement en cours pour les régimes de conformité du PTET et du PMI, le nombre d’inspections de conformité déclenchées en raison de l’obtention d’information à la suite de signalements de violence, ou de risques de violence, et les résultats associés à ces inspections feront également l’objet d’un suivi.

On mettra en place une norme de service de cinq jours ouvrables pour le traitement des demandes de permis de travail dans le cadre de cette mesure, et, conformément aux rapports publics réguliers d’IRCC et à ses normes de service pour les clients de tous ses secteurs d’activité, le Ministère visera à respecter cette norme de service dans 80 % des cas.

Personne-ressource

Jordan Thompson
Directeur intérimaire
Politiques et programmes à l’intention des résidents temporaires
365, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)
K1A 1L1
Courriel : IRCC.TempResRegulations-ResTempReglement.IRCC@cic.gc.ca