La Gazette du Canada, Partie I, volume 153, numéro 24 : DÉCRETS

Le 15 juin 2019

MINISTÈRE DE L’ENVIRONNEMENT

LOI CANADIENNE SUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT (1999)

Décret approuvant l’Arrêté d’urgence modifiant l’application du Règlement sur les émissions de gaz à effet de serre des véhicules lourds et de leurs moteurs (normes pour les remorques)

C.P. 2019-761 Le 9 juin 2019

Sur recommandation de la ministre de l’Environnement et en vertu du paragraphe 163(3) de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) référence a, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil approuve l’Arrêté d’urgence modifiant l’application du Règlement sur les émissions de gaz à effet de serre des véhicules lourds et de leurs moteurs (normes pour les remorques), pris le 27 mai, 2019 par la ministre de l’Environnement.

NOTE EXPLICATIVE

(Cette note ne fait pas partie du Décret.)

Proposition

Le décret approuve l’Arrêté d’urgence modifiant l’application du Règlement sur les émissions de gaz à effet de serre des véhicules lourds et de leurs moteurs (normes pour les remorques) [l’arrêté d’urgence] pris par la ministre de l’Environnement le 27 mai 2019. Pris en vertu du paragraphe 163(1) de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) [LCPE], l’arrêté d’urgence repousse la mise en œuvre des normes d’émissions de gaz à effet de serre (GES) pour les remorques au Canada en raison de la décision de la cour d’appel aux États-Unis. L’autorité ministérielle de prendre un arrêté d’urgence en vertu du paragraphe 163(1) de la LCPE peut être invoquée afin de maintenir l’harmonisation.

En vertu du Règlement sur les émissions de gaz à effet de serre des véhicules lourds et de leurs moteurs (le Règlement), les entreprises sont tenues d’assujettir leurs remorques aux normes décrites aux paragraphes 16.1(1) ou 33.1(1) ou (2) du Règlement, selon le cas. Le Règlement s’applique à certaines remorques, telles qu’elles ont été définies par le Règlement, dont la fabrication est complétée le 1er janvier 2020 ou après cette date.

Conformément au paragraphe 163(3) de la LCPE, l’arrêté d’urgence cesserait d’avoir effet 14 jours après avoir été pris, à moins d’être approuvé par le gouverneur en conseil dans ce délai. Conformément au paragraphe 163(5) de la LCPE, l’arrêté d’urgence cessera d’avoir effet à son abrogation, lorsque le Règlement sera modifié de façon à donner effet à l’arrêté ou si rien n’est fait, un an après sa prise, selon celle de ces éventualités qui se présentera la première.

La LCPE confère aux autorités le pouvoir de prendre un arrêté d’urgence pour suspendre l’application de règlements gouvernant les émissions des véhicules, des moteurs et d’équipements en vertu de la LCPE pour une période d’au plus un an en réponse à la décision d’une cour étrangère lorsque le règlement au Canada est harmonisé avec celui de cet autre pays, conformément au paragraphe 163(1) de la LCPE.

Objectif

L’objectif de l’arrêté d’urgence, pris en vertu du paragraphe 163(1) de la LCPE, vise à repousser la mise en œuvre des normes d’émissions de GES pour les remorques au Canada d’une année après la prise de l’arrêté d’urgence afin que la situation aux États-Unis devienne plus certaine et pour permettre au ministère de l’Environnement (le Ministère) d’évaluer les répercussions économiques de mettre en œuvre les normes pour les remorques au Canada sans que les normes correspondantes de l’Environmental Protection Agency des États-Unis (EPA) soient en vigueur.

Contexte

Le Règlement sur les émissions de gaz à effet de serre des véhicules lourds et de leurs moteurs (le Règlement), pris en vertu de la LCPE, a été publié dans la Partie II de la Gazette du Canada le 13 mars 2013. Les normes d’émissions de GES du Règlement s’appliquent aux véhicules lourds et à leurs moteurs des années de modèle 2014 et ultérieures et elles atteignent leur niveau maximal à compter de l’année de modèle 2018. Étant donné que le secteur de la fabrication de véhicules nord-américain est grandement intégré, ces normes sont alignées avec celles des États-Unis.

Le 25 octobre 2016, l’EPA et la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA) des États-Unis ont publié le règlement définitif concernant la deuxième phase des normes d’émissions de GES et d’efficacité en carburant pour les véhicules lourds, leurs moteurs et les remorques (dénommé la phase 2). Les normes de phase 2, mises en œuvre pour atteindre leur niveau maximal avec l’année de modèle 2027, s’appuient sur les normes existantes mises en œuvre pour les années de modèle 2014 à 2018. De plus, de nouvelles normes ont été introduites pour les remorques tirées par des tracteurs routiers, puisque la conception des remorques a une incidence sur les émissions de GES et la consommation de carburant des véhicules utilisés pour les tirer.

En décembre 2016, la Truck Trailer Manufacturers Association (TTMA), l’association représentant l’industrie des remorques aux États-Unis, a déposé une pétition demandant la révision des normes de l’EPA visant les remorques auprès d’une cour d’appel américaine, soit l’U.S. Court of Appeals for the D.C. Circuit. Cette pétition avait comme argument que l’EPA n’a pas l’autorité de réglementer les remorques. Au cours de l’année 2017, la TTMA a également déposé des pétitions selon le processus réglementaire américain (Petitions for Reconsideration) demandant que l’EPA reconsidère et suspende la mise en œuvre des normes d’émissions de GES pour les remorques, lesquelles devaient entrer en vigueur le 1er janvier 2018.

En réponse aux enjeux juridiques et aux pétitions déposées par l’industrie des remorques américaine, le 17 août 2017, l’EPA a annoncé qu’elle entamait un processus réglementaire afin de modifier ses dispositions de la phase 2 relatives aux remorques. De plus, le 27 octobre 2017, la cour d’appel américaine a suspendu la mise en œuvre des dispositions relatives aux remorques de la phase 2 de l’EPA. Par conséquent, l’EPA n’applique pas actuellement ces dispositions.

Le 30 mai 2018, le Règlement modifiant le Règlement sur les émissions de gaz à effet de serre des véhicules lourds et de leurs moteurs et d’autres règlements pris en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) [les modifications, aussi dénommées la phase 2] a été publié dans la Partie II de la Gazette du Canada et est entré en vigueur le 16 novembre 2018. Les modifications établissent des normes d’émissions de GES plus rigoureuses pour les véhicules lourds routiers et leurs moteurs à compter de l’année de modèle 2021. De plus, les modifications introduisent de nouvelles normes d’émissions de GES pour les remorques tirées par des tracteurs routiers dont la fabrication est complétée le 1er janvier 2020 ou après cette date. Les modifications sont harmonisées avec les normes et les méthodes d’essais correspondantes du règlement définitif de l’EPA finalisé en octobre 2016. Le Règlement vise les entreprises qui fabriquent ou importent de nouveaux véhicules lourds routiers, leurs moteurs et de nouvelles remorques en vue de leur vente au Canada.

En prenant la décision d’inclure les normes d’émissions de GES pour les remorques, malgré la suspension des normes aux États-Unis, l’intention du Canada était de surveiller les développements aux États-Unis et d’évaluer si des modifications doivent être apportées dans l’avenir au règlement canadien apparenté selon la conclusion des procédures relatives aux enjeux juridiques et à la réglementation fédérale américaine. À l’heure actuelle, il n’y a aucune certitude sur la conclusion de ces procédures, et les parties intéressées ont des inquiétudes concernant les répercussions économiques potentielles si le Canada va de l’avant sans l’EPA.

Aux États-Unis, une partie du parc de remorques est composée de remorques équipées de technologies de réduction des GES sur une base volontaire dans le but de tirer avantage des économies de carburant. Le California Air Resources Board a également en place des normes harmonisées avec celles de l’EPA et va ainsi de l’avant avec des normes pour les remorques qui entreront en vigueur en 2020 en Californie. L’approche californienne se traduira par une certaine pénétration du marché aux États-Unis de remorques conformes aux normes de la phase 2. Cependant, on ne sait pas si le niveau d’adoption des nouvelles technologies résultant de ces initiatives atténuera les inquiétudes soulevées par l’industrie canadienne.

Une analyse plus approfondie est nécessaire afin d’évaluer l’ampleur et la portée de tous les risques potentiels pour l’industrie. Il n’est pas possible à court terme de faire une analyse économique exhaustive canadienne sur les normes pour les remorques uniques au Canada et de consulter les parties intéressées sur le sujet. Par conséquent, le Ministère reconnaît l’incertitude et les risques possibles associés à la mise en œuvre des normes pour les remorques en janvier 2020 au Canada alors que les normes correspondantes sont suspendues aux États-Unis.

Répercussions

Un délai d’un an, après la prise de l’arrêté d’urgence, minimisera le risque associé à toutes conséquences imprévues et donnera le temps d’évaluer les répercussions économiques de la mise en œuvre des normes pour les remorques au Canada. Une telle évaluation permettra également d’éclairer une décision future à savoir si le Canada devrait maintenir ou modifier ses normes pour les remorques.

On prévoit que l’arrêté d’urgence aura un effet marginal sur le bilan environnemental en comparaison avec les avantages totaux du Règlement. Repousser les normes pour les remorques d’une année de modèle diminuerait les réductions prévues de GES de seulement 0,4 mégatonne (Mt) d’équivalent en dioxyde de carbone (éq. CO2) pour les remorques de l’année de modèle 2020, relativement aux 73 Mt d’éq. CO2 prévus dans l’ensemble pour la phase 2 pour les années de modèle allant de 2020 à 2029.

Consultation

Lorsque les modifications ont été élaborées et finalisées, les parties intéressées au Canada appuyaient les normes du Ministère, lesquelles sont alignées avec celles des États-Unis. Cependant, en raison de la situation actuelle, les normes canadiennes entreraient en vigueur avant les normes fédérales américaines correspondantes.

En conséquence, depuis l’été 2018, le Ministère a consulté l’industrie canadienne de la fabrication de remorques et du camionnage pour suivre les progrès de l’industrie à se conformer aux nouvelles normes pour les remorques au Canada. En janvier 2019, l’industrie canadienne a fait savoir au Ministère qu’elle allait faire face à des répercussions économiques défavorables si le Ministère allait de l’avant avec la mise en œuvre des normes pour les remorques alors que les normes correspondantes aux États-Unis sont suspendues. De plus, une organisation non gouvernementale de l’environnement a recommandé que le Canada maintienne les normes d’émissions de GES pour les remorques dans leur intégralité et que le Ministère s’engage à faire une autre analyse économique.

L’industrie de la fabrication des remorques du Canada, laquelle est essentiellement concentrée au Québec, en Ontario et dans les Prairies, est principalement constituée d’un éventail de petites entreprises qui fabriquent des remorques spécialisées et d’un nombre d’entreprises plus grandes qui produisent des remorques fourgons. Les inquiétudes principales soulevées par l’industrie canadienne comprennent l’augmentation des coûts pour se conformer aux normes, une disponibilité de la technologie de réduction des émissions pour les remorques plus limitée que prévu en raison d’une production réduite aux États-Unis, et un important désavantage compétitif comparativement aux plus grands fabricants américains. Les fabricants de remorques canadiens sont inquiets que les plus grands fabricants aux États-Unis puissent plus facilement amortir les coûts différentiels associés à l’installation des nouvelles technologies nécessaires sur les remorques destinées à la vente au Canada qu’ils produisent en plus petit nombre comparativement à leurs volumes totaux.

Ainsi, l’industrie canadienne recondamne fortement que la date de mise en vigueur des dispositions pour les remorques au Canada soit repoussée au moins jusqu’à ce qu’une nouvelle analyse économique exhaustive soit faite par le Ministère et que la manière dont l’EPA va procéder soit connue.

Personne-ressource

Stéphane Couroux
Directeur
Division des transports
Environnement et Changement climatique Canada
351, boulevard Saint-Joseph, 13e étage
Gatineau (Québec)
K1A 0H3
Téléphone : 819‑420‑8020
Courriel : Stephane.Couroux@canada.ca